10 Décembre 2016
Pour le sociologue J-Louis Schlegel, directeur de la rédaction de la revue «Esprit» nier le multi-culturalisme de la société française pousse la droite à prôner un retour à un passé fantasmé. « Les catholiques issus de la frange identitaire et racines chrétiennes instrumentalisées contre l’islam »
C’est une des questions qui a agité la primaire de la droite et du centre conservatrice ont-ils pesé dans la « flambée » Fillon ? Ces troupes se reconnaissent dans une thématique apparue depuis une dizaine d’années : les racines chrétiennes de la France. Une notion qui révèle des peurs et un malaise identitaire, selon Jean-Louis Schlegel, sociologue des religions et philosophe,directeur de la rédaction de la revue "Esprit"
A l’initiative de parlementaires allemands, émerge une version qui fait mention de Dieu et du christianisme dans le préambule du traité. Jacques Chirac demande à Lionel Jospin, alors Premier ministre, de s’y opposer au nom de la laïcité. Les laïques français ont en effet vu là - à tort - une volonté de « rechristianiser l’Europe ». Je ne dis pas qu’il n’y avait pas d’arrière-pensées, mais c’était surtout un rappel historique, factuel. La polémique n’a d’ailleurs pris qu’en France, où la crainte était que d’un préambule, on tire des conclusions normatives inacceptables.
Où se situe le Front national ?
Marine Le Pen ne reprend pas ce langage. Mais c’était avant l’émergence de François Fillon ! En fait, le Front national, aux alentours de 2010, sous l’égide de Marine Le Pen, se veut le vrai champion de la laïcité républicaine, face à une droite trop compréhensive, trop prête aux accommodements raisonnables. Les prières de rue, les repas halal, les femmes voilées, tout devient l’occasion de stigmatiser la visibilité supposée arrogante des musulmans, leur non-respect de la laïcité française, les faveurs que la République leur accorde. C’est Marion Maréchal-Le Pen qui va incarner le thème des racines chrétiennes, reprenant l’héritage de son grand-père, Jean-Marie Le Pen.
Des crèches dans les mairies, est-ce revendiquer ces racines chrétiennes ?
Les crèches dans l’espace public (hors des églises) font partie du folklore et de l’ambiance du temps de Noël. Beaucoup d’ailleurs ne connaissent que vaguement leur origine religieuse : c’est du folklore chrétien. Dans le contexte de crispation actuel, leur origine chrétienne a été rappelée par des militants de la laïcité, qui ont demandé leur interdiction dans les bâtiments publics, et par des maires qui ont politisé la question comme Robert Ménard à Béziers. Ces maires ont instrumentalisé les crèches pour marquer qu’on était en terre chrétienne, contre les musulmans et l’islam, mais aussi contre une laïcité présentée comme antichrétienne et intolérante.
Fillon est-il le héraut des racines chrétiennes ?
Catholique pratiquant, il incarne une bourgeoisie aisée de province où le catholicisme fait partie des meubles. Il a pris la peine de répondre au texte des évêques sur la politique, parvenant à démontrer qu’il est en accord avec tout. Il a terminé un débat par un «n’ayez pas peur…» une injonction célèbre de Jean Paul II au début de son pontificat. Il rejoint cette culture qui se lève contre les «bobos» urbains, contre l’idéologie libérale-libertaire de Mai 68. Il surfe sur la thématique des racines chrétiennes, sans les mettre au centre de son discours. Contrairement à Alain Juppé, il a bien senti l’évolution de la droite française.
Il affirme qu’il ne veut pas d’une France multiculturelle… On ne sait si c’est du discours de campagne ou une conviction profonde. Mais à droite, ce discours est très partagé. Le fait multiculturel est une réalité, mais à droite, on fait comme si c’était une politique voulue, programmée, une idéologie de gauche, qui piétine «nos valeurs».
Comment réagit l’épiscopat face à ce discours ?
La majorité des évêques français perçoit l’instrumentalisation politique. Ils voient et entendent les groupes qui «surfent» sur ce thème. Le texte sur la politique qu’ils ont publié à la mi-octobre ne va pas dans ce sens et, sans surprise, ils ont mis en rogne la droite la plus libérale sur le plan économique et la plus «tradi».
Ci-dessous le cas d'Hénin Beaumont, mairie FN:
Annulation de la crèche de Noël d'Hénin-Beaumont : le reportag...La chaîne d'info locale Grand Lille TV a consacré hier soir un reportage à l'annulation de la crèche de Noël d'Hénin-Beaumont suite à mon recours au Tribunal Administratif de Lille.
Publié par David Noël, conseiller municipal PCF d'Hénin-Beaumont sur samedi 3 décembre 2016